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Le remaniement des soins aux enfants autochtones exige des solutions axées sur la santé mentale et deux générations

by Nicole Letourneau
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Le gouvernement fédéral et les Premières Nations du Canada ont conclu une entente historique de 40 milliards de dollars qui indemnisera les personnes lésées par le système des services à l’enfance dans les réserves du Canada. Non seulement cette entente contribuera à réparer les torts du passé, mais elle prévoit en outre que la moitié des fonds serviront à entamer une réforme à long terme du programme de services à l’enfance dans les réserves. Il s’agit d’une magnifique occasion de soutenir la santé et le développement de nombreux enfants à risque. Les Canadiens autochtones représentent l’une des populations les plus jeunes du pays et nécessitent un système de protection de l’enfance qui satisfait aux besoins de leurs communautés.

Le Canada et les Premières Nations ne peuvent pas tergiverser : les enfants autochtones dans le système doivent recevoir dès maintenant des services fondés sur des données probantes afin d’appuyer le développement de leur cerveau, ainsi que leur neurodéveloppement. Les traumatismes précoces ont des répercussions permanentes sur le développement des systèmes biologiques et augmentent le risque d’une foule de problèmes physiques et de troubles d’apprentissage et de santé mentale au cours de la vie. Les nourrissons et les enfants d’âge préscolaire ont particulièrement besoin de services, car ils vivent la période de croissance neuronale la plus rapide de leur vie. C’est en effet à cet âge que le cerveau est extraordinairement sensible aux effets négatifs des traumatismes et aux effets positifs des relations saines et stimulantes.

La réforme de notre système de protection de l’enfance ne doit pas aggraver le traumatisme des enfants déjà affectés par les mauvais traitements et la négligence.

Heureusement, de nouvelles études à la croisée de la santé publique, des neurosciences développementales et de l’économie procurent des solutions toutes faites. D’innombrables études et rapports répètent à maintes reprises qu’en plus de répondre aux besoins fondamentaux de logement, de nourriture et de vêtements, la réussite des enfants dans le système de protection de l’enfance exige que l’on mette l’accent sur la promotion de la santé mentale des nourrissons et des jeunes enfants, sans quoi ceux-ci risquent de faire face toute leur vie à des conséquences désastreuses.

Le concept de la santé mentale d’un nourrisson peut faire penser à un bébé sur un sofa de type freudien, mais quand on évalue la santé mentale des tout-petits, on cherche plutôt à déterminer dans quelle mesure un enfant se développe du point de vue social et émotionnel de la naissance à l’âge de trois ans. Les enfants dont la santé mentale n’est pas optimale montrent souvent des signes précoces en présentant des troubles de comportement tels que l’anxiété, l’agressivité et l’hyperactivité, qui augmentent considérablement le risque de troubles de santé mentale à l’adolescence.

Les études indiquent également qu’il existe un lien entre de tels troubles durant l’adolescence et des problèmes de santé mentale, juridiques, financiers et sociaux à l’âge adulte, et accroissent même le risque de transmission intergénérationnelle de traumatisme.

Dans notre examen et notre recherche interventionnelle publiés, nous démontrons que la santé mentale chez les nourrissons et les enfants en bas âge est favorisée lorsque les soins sont stimulants, sensibles et adaptés aux besoins et au niveau de développement. Les interventions qui cherchent à aider les dispensateurs de soins à réfléchir aux pensées, aux sentiments, aux désirs et aux intentions de leurs nourrissons et de leurs jeunes enfants réussissent à améliorer leur sensibilité et leur réceptivité  à leurs besoins. Il est important de noter que ces compétences peuvent être enseignées aux dispensateurs de soins, qu’il s’agisse des parents biologiques, de membres de la parenté ou des parents d’accueil. Une fois réformé, le système de protection de l’enfance doit déployer tous les efforts possibles pour aider les dispensateurs de soins à fournir ces soins essentiels qui favorisent la santé mentale de l’enfant en bas âge, pour son bien à long terme.

Les études révèlent en outre que pour assurer la réussite auprès d’enfants traumatisés, il est essentiel de mettre l’accent sur des solutions bigénérationnelles qui font participer l’enfant et ses dispensateurs de soins au soutien de la santé mentale et du développement. Les enfants exposés à un traumatisme bénéficient de services de santé et d’éducation, notamment de visites à domicile et de programmes d’intervention précoce (p. ex. comme le programme Bon départ), tandis que leurs dispensateurs de soins reçoivent des services adaptés à leurs besoins, par exemple de l’éducation parentale axée sur la sensibilité et la réceptivité, ainsi que des approches en matière de discipline positive, de l’alphabétisation, un soutien à l’achèvement des études, une formation professionnelle, un traitement des troubles de santé mentale, etc.

Les solutions bigénérationnelles ont démontré qu’elles augmentent l’emploi des dispensateurs de soins et réduisent la dépendance envers l’assistance publique, et procurent un excellent rendement de l’investissement (4 $ par dollar investi). Pour leur part, les enfants dépassent les jalons du développement par rapport à leurs pairs du même âge. Il existe de nombreux exemples dont la réforme de notre système de protection de l’enfance dans les réserves peut s’inspirer et tirer parti. Par exemple, le Programme d’aide préscolaire aux Autochtones et le Programme Nurse-Family Partnership existent déjà au Canada.

Les enfants autochtones et leur famille représentent une partie grandissante et importante du tissu social de cette nation. Tout comme dans n’importe quelle collectivité, certaines familles ont besoin de plus de soutien que d’autres. Ensemble, veillons à offrir le meilleur système de protection de l’enfance possible dans les réserves, un système focalisé sur la santé mentale des nourrissons et des jeunes enfants, ainsi que sur la réussite des dispensateurs de soins, afin de mettre fin au traumatisme qui a affecté un trop grand nombre de générations.

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Photo publiée avec l’aimable autorisation d’iStock

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