Home Français L’action du gouvernement face à la crise des soins de longue durée doit viser des changements fondés sur des données robustes

L’action du gouvernement face à la crise des soins de longue durée doit viser des changements fondés sur des données robustes

by Carole Estabrooks
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Plus de 19 000 personnes âgées ont succombé à la COVID-19 au Canada, la majorité dans des maisons de soins de longue durée (SLD); plus de 17 000 avaient plus de 60 ans. La crise persiste, malgré l’adoption de mesures d’urgence par les gouvernements et les exploitants et la mise en œuvre, dans certaines provinces, de solutions novatrices au problème de la pénurie de personnel. L’idée de rémunérer des proches pour dispenser des soins, de créer de nouveaux rôles de soutien et d’offrir un supplément de salaire figure parmi celles-ci.

L’adoption trop tardive de ces mesures témoigne d’une approche de gestion à la pièce.

En juin dernier, le groupe de travail de la Société royale du Canada sur la COVID-19 publiait une note de breffagecomprenant neuf recommandations susceptibles « non seulement de résoudre la crise associée à la maladie infectieuse actuelle, mais aussi de réformer le secteur qui a permis à cette crise de causer des ravages aussi dévastateurs qu’évitables ».

Le gouvernement fédéral a entrepris, avec les provinces et territoires, de définir des normes nationales en matière de SLD. La création d’un fonds pour la prévention et le contrôle des infections dans les établissements de SLD permettra d’injecter des sommes importantes pour protéger leurs pensionnaires. Cependant, ces initiatives ne suffiront pas à apporter des améliorations durables à moins d’observer deux principes fondamentaux inhérents à tout système de santé apprenant : d’abord, la collecte de données exhaustives et de qualité; ensuite, un écosystème dans lequel les directions de la santé et des établissements de SLD s’appuient sur l’information recueillie pour prendre leurs décisions. L’un ne va pas sans l’autre dans un cycle axé sur l’apprentissage et l’amélioration continue.

La crise qui secoue les soins de longue durée est en partie une crise en matière de données.

En ce moment, les seules données recueillies de manière systématique dans la majorité des provinces, mais pas dans toutes, concernent la qualité des soins. Elles sont essentielles, bien entendu, mais si elles étaient suffisantes, le secteur des SLD ne serait pas dans l’état actuel. Et la population ne se demanderait pas pourquoi le Canada affiche le pire bilan de tous les pays relativement aux répercussions de la pandémie sur ce secteur.

Ces données doivent être exhaustives et fiables. Elles doivent être colligées par toutes les provinces et tous les territoires. Elles doivent être publiées en toute transparence. Et elles doivent orienter notre action.

En particulier, il y a quatre grandes lacunes à combler. Premièrement, il nous faut des données détaillées sur la qualité de vie des personnes atteintes de troubles cognitifs, qui nous indiqueront l’expérience subjective que font ces personnes (qui forment la majorité des pensionnaires) de leur vie en établissement.

Deuxièmement, nous avons besoin de données détaillées sur nos indispensables prestataires de soins directs. Elles comprendraient des données démographiques de base sur la race et l’origine ethnique, ainsi que des données sur l’état de santé, le bien-être et les expériences de travail – toutes essentielles à la planification des effectifs de santé et des mesures d’amélioration destinées à garantir une bonne qualité de vie au travail.

Troisièmement, il nous faudrait des données sur la réalité des familles et des proches aidants non rémunérés – partenaires de plus en plus indispensables de la prestation des soins. Et quatrièmement, de données sur l’environnement de travail, en raison de sa forte incidence sur les membres du personnel, les pensionnaires et les proches.

Par contre, si nous n’instaurons pas d’écosystème décisionnel fondé sur les conclusions et les tendances issues des données, auxquelles pourront accéder facilement tous les gestionnaires de la santé à tous les échelons; si nous ne donnons pas à ces derniers les moyens d’apporter des améliorations et d’opérer les changements nécessaires – alors cette information ne servira qu’à nous donner bonne conscience.

L’exercice n’atteindra pas son but si sa seule utilité est de mettre à la disposition des scientifiques des bases de données riches en information.

Nous avons besoin d’un système où les changements de fond préconisés sur la base des données visent les points de service. Peu importe son degré de complexité, la collecte de données sera la partie facile de l’équation.

Le rapport de la Société royale du Canada recommande d’assortir le soutien fédéral accordé au secteur des SLD de conditions relatives à la collecte de données dans toutes les sphères pertinentes à la gestion et au soutien efficace des établissements de SLD, de leurs pensionnaires et de leurs effectifs. En leur fournissant des données de qualité accessibles et de moyens d’action, les gestionnaires seront en mesure de définir des objectifs et de mettre en œuvre des plans d’action, d’étude et d’évaluation dans le cadre d’une démarche axée sur le cycle d’apprentissage et d’amélioration.

Nous avons établi, au sein d’une centaine d’établissements de SLD que nous suivons depuis presque 15 ans dans le cadre de notre projet longitudinal (Translating Research in Elder Care), les fondements d’un mécanisme de ce type qui donne des résultats positifs pour les gestionnaires, le personnel aide-soignant, d’autres prestataires de soins directs et les pensionnaires. Il s’agit d’un travail complexe, mais faisable.

Lorsque les gestionnaires peuvent compter sur une structure de soutien reposant sur de bonnes données, les pensionnaires reçoivent de meilleurs soins et le secteur des soins de longue durée s’en porte mieux – et nous aussi d’ailleurs.

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Photo gracieuseté de Pixabay

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