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Au Canada, il y a peu d’aide en matière de finances pour les personnes qui en ont le plus besoin

by Elizabeth Mulholland
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Pour obtenir de l’aide en matière de finances et d’impôts, bon nombre de Canadiennes et Canadiens font appel à leur institution financière, à un conseiller, à un comptable ou à une entreprise de préparation de déclarations de revenus.

Vers qui peuvent se tourner les moins nantis?

Selon un nouveau rapport de Prospérité Canada, les personnes à faible revenu ont de la difficulté à trouver sur le marché des services financiers abordables, fiables et convenant à leurs besoins, qui diffèrent beaucoup de ceux du reste de la population canadienne.

Préparée en collaboration avec des fournisseurs de services financiers commerciaux et communautaires, à partir de recherches du Financial Resilience Institute, notre étude révèle qu’il existe peu d’arguments pour convaincre les entreprises de concevoir et commercialiser des services financiers destinés aux personnes à faible revenu, qui leur procurent moins de bénéfices que la clientèle plus aisée.

Par conséquent, la plupart des services financiers courants ne répondent pas aux besoins des personnes à faible revenu, et la majorité des fournisseurs de services ne connaissent pas assez la réalité de cette population pour lui donner des conseils adéquats et fiables. Par exemple, pour les personnes à revenu modeste, la contribution à un REER plutôt qu’à un CELI entraînera inévitablement de coûteuses récupérations de prestations au moment de la retraite, mais les institutions financières ne tiennent pas toujours compte de cela lorsqu’elles vendent un produit d’épargne à cette clientèle.

Des comptoirs d’impôts communautaires proposent de l’assistance gratuite pour la préparation de déclarations de revenus, mais uniquement durant la période des impôts et aux personnes dont la situation fiscale est simple. Les personnes à faible revenu qui cherchent de l’aide à d’autres moments de l’année, qui travaillent à leur compte ou qui ont une situation fiscale plus complexe doivent généralement faire affaire avec une entreprise commerciale de préparation de déclarations de revenus. Dans la plupart des régions du pays, aucune assistance n’est offerte gratuitement et à longueur d’année pour régler des problèmes fiscaux ou saisir les subtilités des programmes de prestations de revenu.

Des organismes à but non lucratif peuvent fournir des conseils gratuits ou à faible coût aux personnes faisant face à l’endettement, mais ces organismes manquent de financement et ne sont pas présents partout.

« Ici au Québec, il existe une trentaine d’associations de consommateurs qui offrent des services autour des finances personnelles. Toutefois, comme notre financement est insuffisant, il nous est impossible de répondre à la demande. Or, le contexte actuel, qui allie inflation et ratio d’endettement élevé, rend le problème d’accès à nos services encore plus criant », affirme Gabriele Roehl, conseillère budgétaire à l’ACEF du Sud-Ouest de Montréal.

Les institutions financières proposent des services de base gratuitement (p. ex. des applis de gestion de budget et d’épargne ou de l’aide pour choisir un compte ou un produit d’emprunt adéquat), mais elles réservent leurs services de planification financière détaillée aux détenteurs de biens et de placements de valeur. D’autres fournisseurs de services financiers sont rémunérés sous forme de commissions de placement ou d’honoraires, ce qui les rend pratiquement inaccessibles aux personnes à faible revenu.

La méfiance constitue un autre obstacle. En effet, comme les personnes à faible revenu ont souvent un niveau de confiance inférieur, elles sont moins susceptibles de faire confiance aux professionnels en finances. Cette méfiance est encore plus marquée chez les personnes à faible revenu racisées, autochtones, 2ELGBTQI+ ou en situation de handicap qui doivent composer en plus avec la discrimination.

Alors, où les personnes à faible revenu trouveront-elles l’aide dont elles ont besoin?

L’accès à des services et conseils financiers adéquats et de qualité est associé à une bonne situation financière. Par conséquent, si l’on ne s’attaque pas au manque de services offerts sur le marché aux personnes à faible revenu, celles-ci ne trouveront pas l’aide nécessaire pour maximiser leur revenu, régler des problèmes financiers urgents ou établir et atteindre des objectifs d’ordre financier.

Alors que la crise de l’abordabilité se poursuit au pays, il est impératif de résoudre ce problème, car le prix de l’inaction ne cesse d’augmenter pour les personnes à faible revenu, qui voient leurs difficultés s’aggraver, et pour la population générale, qui est confrontée à l’explosion de la demande pour des services communautaires, sociaux et de santé.

Des projets pilotes d’envergure subventionnés par le gouvernement ont démontré l’existence d’un besoin pour des services financiers gratuits dans la communauté et révélé que ceux-ci réduisaient le stress financier des personnes à faible revenu et les aidaient à améliorer leur revenu et d’autres aspects de leurs finances. Selon un rapport, 95 pour cent des participants recommanderaient ces services à d’autres. Le gouvernement de l’Ontario a pris la sage décision de continuer de financer ces projets, mais l’obtention d’un soutien durable et stratégique du fédéral demeure problématique.

Il est temps que le Canada suive l’exemple d’autres pays (comme le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande), qui ont adopté des mesures vigoureuses pour pallier un manque semblable sur leur marché grâce à la collaboration intersectorielle et à des investissements dans des services financiers gouvernementaux et communautaires qui fournissent aux citoyens l’aide que ne peut leur offrir le secteur privé.

Au Canada, l’écart en matière d’accès aux services financiers ne se comblera pas de lui-même et les personnes à faible revenu n’ont pas les moyens d’attendre. Il est temps de passer à l’action

Photo gracieuseté de DepositPhoto

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