La hausse des prix pourrait réduire la consommation et générer des revenus pour des programmes éducatifs
Pour contrôler les changements climatiques, on ne remplacerait pas le charbon par du pétrole. De même que, pour diminuer sa consommation d’alcool, on ne se limiterait pas à boire du whisky plutôt que du vin.
Et si nous voulons prévenir les nombreux dangers de la nicotine et de l’inhalation de substances nocives pour la santé, il ne suffit pas que les gens renoncent à la cigarette pour vapoter.
Sachant cela, des gouvernements d’ici et de partout dans le monde ont adopté des politiques visant à limiter le vapotage, en particulier chez les jeunes et les non-fumeurs. Toutefois, les provinces de l’Ontario et du Manitoba sont les seules à ne pas saisir l’occasion d’augmenter la taxe sur les produits de vapotage, et ce, tant au détriment de la santé de leur population qu’à celui des coffres de l’État.
Le gouvernement fédéral a adopté des mesures utiles, comme des restrictions sur la publicité, la limitation de la concentration en nicotine pour lutter contre la dépendance, des mises en garde sur les produits, des mesures financières dissuasives, ainsi que l’imposition de restrictions concernant les arômes. Une de ces mesures est la mise en place, par le gouvernement fédéral, d’un cadre coordonné de la taxation des liquides à vapoter. Les provinces et les territoires pourront y participer en ajoutant leur propre taux de taxation à celui du fédéral.
En plus d’entraîner l’augmentation des prix et ainsi limiter l’usage de ces produits, la politique permet de générer des revenus que les gouvernements pourront allouer à des programmes éducatifs pour réduire davantage la consommation. Les gouvernements, la population et notre santé collective : tout le monde y gagne.
Cependant, l’Ontario et le Manitoba n’y ont pas adhéré.
L’Ontario et le Manitoba sont les seules provinces qui n’ont pas annoncé leur participation ou l’imposition de leur propre taxe. Leurs jeunes auront ainsi plus facilement accès à des produits de vapotage, dont le prix au détail peut être aussi bas que 10 $ pour un ensemble pour débutant.
Vapoter, ou utiliser des cigarettes électroniques, consiste à inhaler des liquides à vapoter sous forme de vapeur, qui contiennent de la nicotine ainsi qu’une variété d’arômes pour les rendre attirants. Comparativement au tabagisme, le vapotage évite d’inhaler de la fumée et des particules provenant de la combustion du tabac. Toutefois, l’ingrédient actif du liquide à vapoter demeure la nicotine, un produit provenant du tabac qui est aussi dangereux et addictif que celui qu’on retrouve dans la cigarette.
Inhaler une mixture chimique chauffée présente des risques graves pour la santé pulmonaire, et il faudra un certain temps avant que ces risques soient bien compris. Par contre, il ne fait aucun doute que des ingrédients toxiques aux effets nocifs pour la santé sont émis lors du vapotage. De plus, la recherche commence à lever le voile sur le lien qui existe entre l’exposition passive aux aérosols générés par les produits de vapotage et les symptômes de la bronchite ou l’essoufflement. On a constaté que les risques pour les enfants et les membres de l’entourage d’une personne qui vapote sont aussi élevés que chez ceux d’une personne qui fume la cigarette.
Malheureusement, même si le taux de tabagisme a chuté, une grande part des effets positifs sur la santé publique est perdue vu l’augmentation du vapotage. Chez les jeunes, la hausse de la popularité de la cigarette électronique a surpassé la baisse des taux de tabagisme des dernières années. En 2021, près d’un jeune adulte sur deux, et près d’un adolescent sur trois âgé de plus de 14 ans ont déclaré avoir essayé la cigarette électronique au pays. Dans une enquête menée en 2021 auprès de jeunes Ontariens, on apprend que plus de la moitié des élèves du secondaire ont déclaré que les cigarettes électroniques sont faciles à obtenir, même si leur vente est illégale pour les moins de 19 ans.
En refusant d’imposer la taxe, le Manitoba et l’Ontario rendent l’achat de produits de vapotage plus aisé sur leur territoire que n’importe où ailleurs au pays.
Ainsi, plus de jeunes et d’adultes développeront une dépendance à la nicotine et seront victimes des dangers qu’elle présente pour la santé. Puisqu’il a été démontré que la taxe sur le tabac génère des revenus et contribue à réduire le tabagisme, nous pouvons être certains que la taxe sur les produits de vapotage aurait des avantages similaires. La recherche montre que la hausse du coût des cigarettes électroniques découragera les jeunes qui sont influencés par le prix à commencer à vapoter et préviendra la dépendance.
Les années précédant l’âge adulte sont une période cruciale pour acquérir des habitudes saines. Les poumons sont encore en train de se développer, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux dommages provoqués par le vapotage, et plus à risque de maladie pulmonaire chronique ou cardiovasculaire dans le futur. L’approche coordonnée de la taxation fédérale, provinciale et territoriale des produits de vapotage fait partie d’une stratégie globale qui est essentielle pour réduire l’usage de la nicotine chez les jeunes, tout en incitant les fumeurs et les vapoteurs à cesser leur consommation.
Aujourd’hui, on se demande comment il est possible qu’en 6 à 10 décennies le tabagisme soit devenu à ce point répandu et tendance, avec les conséquences désastreuses pour la santé de la population que l’on connaît. Ne répétons pas nos erreurs en transformant simplement les fumeurs en vapoteurs, laissant les générations futures consternées par notre insouciance.
Et ne laissons pas l’Ontario ou le Manitoba remporter la palme des pires bilans de tous.
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